Publications | Fiches point de vue

L'OUTSOURCING OFFSHORE

L’outsourcing, aussi appelée externalisation, consiste à confier la totalité d’une fonction ou d’un service à un prestataire externe spécialisé, pour une durée pluriannuelle. C’est un service complet accompagné d’un engagement en termes de niveaux de services particulièrement élaborés, qui permet au client de s’exonérer des contraintes que la gestion et la maintenance d’un système informatique impliquent, et se concentrer sur son « cœur de métier ». Le prestataire fournit alors la prestation en conformité avec les niveaux de services, de performance et de responsabilités spécifiés dans le cahier des charges.

Poursuivant l’objectif de maintenir leur compétitivité dans un contexte de forte concurrence sur les prix, les entreprises souhaitent désormais davantage recourir à l’outsourcing offshore, généralement dans les pays émergents, où les coûts salariaux sont plus bas et le personnel qualifié. De plus, les moyens de télécommunication à haut débit permettent désormais de recourir à des prestataires plus ou moins lointains.

Les notions d'Outsourcing Onshore, Outsourcing Offshore et Outsourcing Nearshore

On parle d'outsourcing Onshore lorsque le prestataire travaille dans le même pays du client.

On parle d’outsourcing Offshore en présence de prestations réalisées dans des pays relativement lointains (par exemple l’Inde).

On parle enfin d'outsourcing « Nearshore » lorsque le pays du prestataire est proche de celui du client (ce sont ainsi les pays d’Afrique du Nord ou les pays de l’Est pour la France, le Mexique et le Canada pour les Etats-Unis).

Les prestations externalisées concernées par l’outsourcing offshore

Aujourd’hui, l’outsourcing offshore ne concerne plus seulement les tâches à faible valeur ajoutée et s’étend aux tâches exigeant des niveaux de qualification plus élevés.

Au départ principalement axé sur la maintenance applicative et le développement informatique, l’outsourcing offshore s’est ensuite étendu au Business Process Outsourcing, c’est-à-dire à l’externalisation des processus métier touchant au fonctionnement interne de l’entreprise, et pouvant aller jusqu’à l’externalisation de fonctions stratégiques, telles que la Recherche et Développement, l’élaboration de tableaux de bord ou le contrôle de gestion.

En raison de ses implications sociales, l’offshoring est souvent mal perçu en France. Il serait destructeur d’emploi et source de chômage pour les informaticiens français, d’autant que les tâches nécessitant un niveau de qualification élevé sont désormais visées. Il est parfois avancé que la perte de certains emplois est compensée par de nouveaux besoins.

Une autre source d’inquiétude réside dans la perte de savoir-faire des entreprises françaises et dans le risque de dépendance vis-à-vis de prestataires étrangers.

Les problématiques liées au caractère international du contrat d'outsourcing offshore

La loi applicable

Concernant la loi applicable, les pays de l’Union Européenne reconnaissent la liberté de choix aux parties. D’après la Convention de Rome du 19 juin 1980, cette liberté est quasiment absolue. En l’absence de choix de la loi applicable, la loi désignée par le juge est celle du lieu d’exécution de la prestation caractéristique (qui semble en l’occurrence être celle du prestataire, prestation en contrepartie de laquelle il reçoit une rémunération). Cependant, ces principes ne sont pas universellement reconnus, et une loi étrangère peut tout à fait dénier cette liberté de choix à ses ressortissants.

Le juge compétent

Il en va de même pour la désignation du juge compétent. Si le Règlement européen du 22 décembre 2000 permet aux parties agissant en tant que professionnels de désigner le juge compétent, tous les pays ne donnent pas cette possibilité.

Ainsi, si un juge étranger est saisi d’un litige, il peut rejeter une clause attributive de juridiction ou une clause désignant la loi applicable, ou même appliquer ses lois de police. Même si un juge français est saisi, sa décision peut ne pas recevoir l’exequatur lui permettant d’être exécutée à l’étranger. Et si le recours à l’arbitrage international est toujours possible, cela reste une solution coûteuse.

Les différences de législation apportent donc nécessairement une certaine insécurité juridique. Il faut donc, avant de se lancer dans un projet offshore, se renseigner sur la teneur de la législation en vigueur dans l’Etat du prestataire.

Les droits de propriété intellectuelle - les logiciels - les clauses de cession de droits

Concernant la propriété intellectuelle, il est prévu en droit français que le logiciel est protégé par le droit d’auteur. Si le salarié a créé le logiciel dans le cadre de ses fonctions ou d’après les instructions de son employeur, celui-ci se voit transférer automatiquement les droits de propriété intellectuelle sur ce logiciel, sauf clause contraire. En dehors de ce cadre, lorsqu’il est fait appel à un prestataire extérieur, il faut prévoir une clause de cession de droits dans le contrat. Pour autant, le pays dans lequel est externalisé un développement de logiciel peut avoir une législation très différente qui fait obstacle à l’obtention de droits de propriété intellectuelle en faveur du client. Le logiciel sur lequel le client détient les droits peut par ailleurs être contrefait. Même si le contrat contient les dispositions nécessaires, il n’est pas sûr qu’un tribunal étranger accorde les droits au client ou qu’en cas de désignation d’un tribunal français le jugement rendu soit exécuté à l’étranger. En pratique, il n’est pas dans l’intérêt du prestataire de mettre à mal ses clients, ce qui limite en pratique les risques.

Les règles applicables aux flux transfrontières de données à caractère personnel dans le cadre du contrat d'outsourcing

Le droit français, et plus largement le droit européen, encadrent strictement les transferts internationaux de données à caractère personnel en dehors des pays de l’Union Européenne, un tel transfert n’étant possible que si l’Etat destinataire assure un niveau de protection adéquat et suffisant, au regard notamment de la nature des données transférées, de la finalité et de la durée du traitement. La Commission Européenne n’a décidé qu’un tel niveau était atteint que pour quelques pays, à savoir notamment l’Argentine, le Canada, l’Islande, la Suisse, la Norvège, etc. Pour les autres pays, il existe des exceptions à ces exigences dans des cas délimités par la loi, qui sont d’interprétation stricte. Par ailleurs, le transfert de données peut avoir lieu si les clauses contractuelles entre le responsable du traitement et le destinataire des données ou si les règles internes de l’entreprise destinataire assurent un niveau de protection suffisant, sous réserve de l’autorisation de la CNIL. Toutes ces règles sont sanctionnées pénalement.

Avant tout projet d’externalisation offshore, il est donc nécessaire que l’entreprise cliente, responsable du traitement, fasse un audit des données qui sont susceptibles d’être transférées dans le cadre de l’exécution des prestations externalisées, et prenne le temps de se mettre en conformité avec les exigences légales sur les transferts internationaux de données.

Les contraintes organisationnelles de l'outsourcing offshore

Le recours à l’outsourcing offshore serait beaucoup plus important s’il ne présentait quelques contraintes d’ordre organisationnel.

C’est ainsi que la différence de langue et de culture, des habitudes de travail différentes, ainsi que le décalage horaire, qui peut être particulièrement gênant en cas d’urgence, apportent une certaine complexité dans la mise en œuvre du projet d’externalisation offshore.

Faire appel à un prestataire offshore nécessite donc de repenser l’organisation de l’entreprise quant aux activités externalisées.

Celle-ci doit veiller à disposer en interne d’un personnel qualifié pour gérer ses relations avec le prestataire offshore et contrôler la bonne exécution de ses prestations. Pour cela, il est nécessaire que le personnel maîtrise les langues étrangères concernées (le Nearshore pouvant permettre de détourner cette difficulté), et qu’il dispose d’une certaine ouverture d’esprit lui permettant de communiquer avec des personnes de culture différente. Par ailleurs, une bonne connaissance des prestations externalisées ainsi que du pays de réalisation des prestations est indispensable pour permettre d’assurer une bonne compréhension entre les équipes. Ainsi, il faut désigner un responsable offshore compétent dans les domaines externalisés qui sera amené à se déplacer à l’étranger.

Evidemment, cette maîtrise d’œuvre a nécessairement un coût qu’il faut prévoir en amont.

 

En conclusion : Si le recours à l’outsourcing offshore reste faible en France et continue à inquiéter entreprises et syndicats, ce recours a tendance à s’amplifier. C’est un projet qui nécessite un important travail de préparation en amont et qui prend du temps pour obtenir des résultats à moyens terme. Compte tenu de ce travail de préparation, ce sont le plus souvent les entreprises qui ont déjà expérimenté l’outsourcing au sein de leur pays qui franchissent le pas de l’offshore. Cependant bon nombre d’entreprises sous-estiment les avantages et opportunités de l’externalisation offshore.


- Fiche point de vue : mai 2008 -

© Mascré Heguy Associés - mai 2008

 

Voir nos autres fiches point de vue consacrées notamment au contrat d'outsourcing et au contrat d'infogérance, à la période pré-contractuelle dans les opérations d'externalisation, à la problématique du prêt de main d'oeuvre dans les opérations d'externalisation, à la réversibilité dans les contrats d'externalisation.

 

Voir nos publications consacrées à l'externalisation de l'archivage électronique, aux précautions contractuelles dans les opérations d'externalisation.

Mascré Heguy associés

Mascré Heguy Associés

27/29 rue Raffet

75016 PARIS

Tél: (33-1) 42.56.08.80

Fax: (33-1) 42.56.08.82