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DELEGATIONS ET AUGMENTATIONS DE CAPITAL

L’ordonnance du 24 juin 2004 relative aux valeurs mobilières a modifié le régime des augmentations de capital des Sociétés par actions (articles L 225-127 à L 225- 149-3 du Code de commerce). La réforme permet notamment d’élargir l’objet et la portée des délégations consenties par l’assemblée générale aux organes de direction à l'occasion d'une augmentation de capital.

I – L'assouplissement du régime des délégations en cas d’augmentation de capital

* Les limites à la compétence exclusive de l’assemblée générale extraordinaire pour décider une augmentation de capital

Le principe demeure : l'assemblée générale extraordinaire reste seule compétente pour décider, sur le rapport du conseil d’administration (ou du directoire), une augmentation de capital, qu'elle soit immédiate ou à terme.

Cependant, le nouvel article L 225-129-1 du Code de commerce apporte une innovation importante pour les sociétés anonymes puisque désormais l’assemblée générale extraordinaire « peut déléguer cette compétence au conseil d’administration ou au directoire ».

Cette nouvelle disposition permet en conséquence à l'organe de direction non seulement de définir les modalités pratiques d’émission et de réaliser l’augmentation de capital, mais encore de décider par lui-même du principe de l’augmentation de capital autorisée par l’assemblée générale extraordinaire.

* Le nouveau régime des délégations en cas d’augmentation de capital

 L’ordonnance du 24 juin 2004 élargit la portée des délégations consenties aux organes de direction, offrant désormais deux modes de délégations possibles : la délégation de pouvoir et la délégation de compétence.

Dans le cadre d'une délégation de pouvoir, l’Assemblée générale extraordinaire arrête le principe de l’augmentation de capital, fixe le montant de l’augmentation de capital à réaliser, mais délègue à l’organe de direction le pouvoir de déterminer les modalités pratiques d’émission des titres, et notamment le prix de souscription, la durée de souscription, la constatation du montant des souscriptions, etc.

L'organe de direction doit, dans ce cas, simplement exécuter, et mettre en oeuvre, la décision d'augmentation de capital qui a été arrêtée par l'assemblée.

La délégation de pouvoir est encadrée. A cette fin, l’augmentation de capital doit être réalisée par l'organe de direction dans un délai de 5 ans à compter de la délégation de pouvoir donnée par l'assemblée générale extraordinaire.

  • La délégation de compétence (art. L225-129-2 C.com.)

Dans le cadre d'une délégation de compétence, l’AGE peut désormais déléguer au conseil d’administration (ou au directoire) sa compétence pour décider du principe même d'une augmentation de capital, ce toutefois dans les limites fixées par l’assemblée générale extraordinaire.

Il revient alors à l'organe de direction (conseil d'administration ou directoire) le pouvoir de décider d'augmenter le capital social, de fixer les conditions d’émission, de constater la réalisation de l’augmentation de capital qui en résulte et de procéder à la modification corrélative des statuts.

La délégation de compétence est elle aussi encadrée. L'assemblée a ainsi l’obligation de fixer :

- le plafond global de l’augmentation de capital (ou des augmentations) susceptible(s) d'être mise(s) en oeuvre dans le cadre de cette délégation de compétence, et,
- la durée de la délégation de compétence au profit de l'organe de direction, durée qui ne peut excéder 26 mois.

Dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire de délégation, l'assemblée peut aussi limiter sa délégation de compétence à un certain type de valeurs mobilières à émettre, de prévoir des plafonds différents en fonction de la nature des titres à émettre, etc.

A la différence de la délégation de pouvoir, l'organe de direction peut donc librement décider de recourir ou non à la délégation de compétence qui lui a été donnée par l'assemblée, et d'augmenter ou non le capital social de la société.

* Les nouvelles règles applicables aux sociétés cotées : le pouvoir de subdéléguer

L’article L 225-129-4 du Code de commerce introduit, pour les sociétés cotées, la possibilité d’une subdélégation.

Le conseil d’administration peut ainsi, dans les conditions qu’il fixe, déléguer au directeur général ou à un ou plusieurs directeurs généraux délégués, le pouvoir de décider la réalisation d’une émission de titres ainsi que de celui d’y surseoir.

Le directoire peut déléguer ces mêmes pouvoirs à son président ou à l’un de ses membres.

A charge pour le (ou les) bénéficiaire(s) de rendre compte de l'usage de cette subdélégation, ce dans les conditions et modalités arrêtées par l'organe de direction.

II – L'encadrement des délégations en cas d’augmentation de capital

* L’établissement d'un rapport complémentaire par l'organe de direction

Le législateur n'a pas souhaité transférer des prérogatives sans contrôle ultérieur des actionnaires. L'organe de direction doit en conséquence rendre compte à l'assemblée de l'usage des délégations conférées.

Ainsi et lorsqu’il fait usage d'une délégation de compétence, le conseil d’administration (ou le directoire) doit établir un rapport complémentaire, présenté à l’assemblée générale ordinaire suivante, afin d’informer les actionnaires de l’utilisation faite de la délégation donnée par l'assemblée (art. L225-129 C.com).

Ce rapport complémentaire doit décrire les conditions définitives de l’opération, établies conformément à l’autorisation donnée par l’assemblée (art. 155-2 alinéa 1er du décret du 23 mars 1967 modifié).

Le conseil d’administration (ou le directoire) doit, de même, à cette occasion mentionner les motifs de l’augmentation de capital ainsi que l'incidence de l'augmentation sur la situation des actionnaires et titulaires de valeurs mobilières donnant accès au capital, au regard notamment de sa quote-part des capitaux propres à la clôture du dernier exercice.

* L'établissement d'un tableau récapitulatif des délégations en cours

Doit être adjoint à ce rapport, un tableau récapitulatif des délégations en cours de validité ainsi que de leur utilisation au cours de l’exercice.

L’inexécution de cette obligation n’entraîne pas la nullité des augmentations de capital, mais peut entraîner la responsabilité des dirigeants de la société. De même, une injonction de faire peut être requise, afin de réaliser cette formalité au besoin sous astreinte (art. L225-149-3 C.com.).

* L’obligation de résolutions particulières de délégation pour certaines décisions importantes :

Pour pouvoir faire l'objet d'une délégation au profit du conseil d'administration (ou du directoire), certaines décisions doivent être prises aux termes de résolutions particulières expresses de l'assemblée. Le législateur a en effet souhaité protéger les actionnaires et éviter à cette occasion l'usage de délégations générales pour réaliser un certain nombre d'opérations importantes. D'où l'obligation pour l'Assemblée de se prononcer, à l'occasion de certaines opérations de délégation, sur des résolutions spécifiques.

Les décisions de délégation devant faire l'objet de résolutions particulières sont :

En conclusion : La délégation de compétence renforce sensiblement le rôle des organes de direction dans le processus de décision des augmentations de capital, sans avoir à recourir systématiquement à l’autorisation des actionnaires pour chaque décision d’augmentation de capital. Le conseil d'administration (ou le directoire) dispose désormais du pouvoir d'apprécier l'opportunité d'une augmentation de capital et de mettre en oeuvre celle-ci. A charge pour l'organe de direction de rendre compte de l'usage de ces délégations dans le cadre de nouveaux rapports présentés à l'assemblée.


- Fiche point de vue : mai 2005 -

© Mascré Heguy Associés - mai 2005

 

 

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